Analyse des Pratiques Professionnelles Protection Enfance F2o
Les professionnels de la protection de l’enfance accompagnent des enfants et des jeunes dans le cadre de mesures administratives ou judiciaires. Très souvent, lorsqu’il y a une situation de placement, ils interviennent à l’aval de la séparation avec les parents.
De ce fait, ils se retrouvent en première ligne de réalités complexes et conflictuelles alternant entre suppléance et substitution parentale. En face d’eux, ou aux bouts de leurs bras, il y a ces enfants qui souffrent. La pluralité des problématiques de l’enfant et de sa famille impliquent la construction d’une clinique de l’instant face à des solutions improvisées souvent fruits d’une urgence à la hâte. Doit-on agir sur l’urgence ou continuons nous d’agir dans l’urgence ? D’ailleurs, qu’est-ce qu’une urgence ?
C’est avant tout une histoire de relation(s)
Le point de départ des activités déployées par les professionnels réside dans la rencontre puis la relation. Ce n’est pas une affaire simple, bien au contraire. La relation est une essence et un outil de travail, c’est un beau paradoxe tel un levier et un obstacle à la fois. De la relation peut naître le conflit, puis la conflictualité, et là encore un paradoxe, puisque le conflit nourrit, tout comme il détruit. C’est la matière noble de l’intervenant social, qu’il agite en agissant ainsi, il se tourmente puis se préoccupe, puisque ses activités sont de la plus haute importance, il y a des enfants bouleversés au cœur d’un système et les professionnels en conscients.
Au confins de tous ces bouleversements, il y a l’enfant, sa famille, son projet, et ces professionnels qui doivent faire équipe dans un contexte né de la séparation, de la souffrance et du conflit. D’ailleurs, de quel projet parlons nous ? D’un projet par ou pour l’enfant ? Les professionnels doivent faire équipe, là encore, doit-on se résigner à l’injonction de « faire équipe » ?
Tout professionnel sait qu’un intervenant social en cache systématiquement un autre, puis plusieurs autres. C’est à partir de ce temps qu’ils forment une équipe, ou du moins, qu’ils tentent de former une équipe. Une équipe n’est pas uniquement la somme d’individualités aux enjeux personnels et aux subjectivités propres. D’ailleurs, forme t-on une équipe ou faisons nous équipe ? Que fait l’équipe dans tout cela ?
L’équipe, se grand « tout » n’est pas une masse uniforme dont les actes sont identiques, comme des machines sur une chaîne de montage pourraient prétendre s’harmoniser à l’unisson. C’est une complexité d’un autre type.
Les professionnels de la protection de l’enfance ont des comptes à rendre à leurs directions, aux enfants, à leurs familles, aux partenaires, aux services de l’ASE. C’est à partir de cet instant que les centres de gravité des professionnels s’amoncellent et se juxtaposent, au risque de les maintenir dans un flou jusqu’aux injonctions paradoxales qu’il faut savoir gérer et qui ont le pouvoir de déboussoler le sens de l’action. Pour qui ou quoi venons nous travailler ?
De ces complexités multiples et quotidiennes viennent s’immiscer d’autres problèmes qui sont apparents, ils sont la face visible de l’iceberg. Quel intervenant social n’a pas été en conflit avec un jeune ou sa famille, ou en désaccord avec un partenaire ou un référent de l’ASE ? Quel projet ou quelle orientation n’ont pas été mené tels que le professionnel l’envisageait ? Quelle équipe ne s’est pas scindée à l’aune d’une crise systémique ou au regard d’une situation individuelle ?
La réalité est que les professionnels ont leurs problèmes qui leurs sont chers et propres. Chaque jour ils endossent leur « bleu » de travail pour agir au sein de sphères d’action sociales en étant confrontés aux réalités des bénéficiaires. Ils sont au cœur de relations et dépendent d’enjeux structurels et systémiques en lien avec des contextes politique, économique et sociologique. Ils sont à la fois au cœur des politiques publiques et au-delà des logiques de système. Comment agir collectivement en prenant conscience de la portée de nos agissements individuels sans comprendre ce qui me pousse à agir ?
L’analyse des pratiques professionnelles…
Les séances d’analyse des pratiques professionnelles visent à présenter des actes professionnels individuels au sein d’un espace collectif. De l’évocation à l’élucidation le chemin est à déblayer puis à construire. Cet espace est animé par un intervenant extérieur à l’institution qui fixe, avec les participants, un cadre à penser sur une temporalité définie.
En tant qu’intervenant social, il est indispensable de penser et d’analyser nos activités, ce qu’elles impliquent dans le quotidien des enfants et des jeunes, et ce qu’elles nous imposent comme engagement personnel.